À jamais immortalisées par le générique de la célèbre émission littéraire Apostrophe, des millions de spectateurs du petit écran ont entendu ces trop courtes mesures interprétées au piano sans savoir qu’elles étaient tirées du Concerto numéro un de Rachmaninov. Une œuvre fiévreuse, née du romantisme échevelé d’un jeune homme qui n’est alors âgé que de dix-neuf ans et qui ouvrira le chemin des trois autres concertos à venir. C’est Seong-Jin Cho, pianiste coréen prodige formé au Conservatoire national de Paris qui prêtera sa jeunesse et sa virtuosité à l’interprétation de cette œuvre.
L’aventure russe se poursuivra en deuxième partie de concert avec la Cinquième symphonie de Prokofiev, créée en 1945, patriotique et martiale, qui célébra en son temps et avec vigueur la victoire sur l’Allemagne nazie. Mais si l’œuvre reçut le Prix Staline, on préférera entendre d’autres paroles, celle de son compositeur, qui déclarait : « J’ai voulu chanter l’homme libre et heureux, sa force, sa générosité et la pureté de son âme. » Un mauvais tour du destin vaudra à Prokofiev de mourir une heure avant le « père des peuples » et de n’avoir qu’une quarantaine d’admirateurs à suivre son cercueil quand la Russie stalinienne pleurait l’un des plus grands dictateurs que la terre n’ait jamais porté... Mais au-delà des œuvres, on se pressera aussi à l’Espace des Arts pour saluer la trop rare venue de l’un des plus beaux orchestres français, le National.